Peintures et photographies,
Atelier Guy Martin,
Vernissage le 30 avril, 35-37 rue de Mirosmenil, 75008 Paris.
par Jean-Paul Gavard-Perret
Jean-Marc Isère - Le Ventre Série Eiffel
Jean-Marc Isère est encore un artiste en devenir. Doté de bien plus qu'un simple talent il cherche encore sa voie. Non que ses travaux présents souffrent d'un inachèvement mais sa quête n'a pas encore trouvé le langage unitaire qui lui donnera la force qu'on sent sous-jacente et prête à jaillir. Tout se passe comme si l'artiste hésitait encore à lâcher ses "re-pères" qui pour une part le paralysent encore.Il en fait, certes, bon usage mais on attend de lui le"débridage" qui va lui permettre de développer une langue plastique plus proche de ses désirs fondamentaux.
Déjà le graphisme de ses peintures s’ouvre à une autre dimension. Et s'il tentent encore de multiples approches on sent que peu à peu il découvre sa propre langue et la manière de l’engager dans l’espace. Il parvient à faire sauter les verrous de divers mystères. De toute une mass et d'une boulimie d'images se constitue peu à peu une stratégie intime et personnelle. Elle se défait de ce qui est trop construit et maîtrisé. Jean-Marc Isère ne se contente plus de "reliefs" ou d'"états"" mais il met en branle un fonctionnement loin des enrobements d'apparat.
Espace de l'imaginaire plus qu'espace de l'image le travail de l’artiste se veut donc totalisateur jusque dans sa fragmentation, ses éclats et ses variations. Car ce qui compte ce n'est pas de trouver ces "impossibles invariants" dont parlait Foucauld mais de toucher à quelque chose qui, dans la peinture comme dans la photographie, ne bougerait pas sans l’intervention proposée par l'artiste. Créent ses propres subversions, luttant contre les fétiches l'artiste parvient à oser envisager ses réalisations comme un avènement : par biffures et estampillages peu à peu quelque chose de différent se joue. Surgissent ce qu'on peut nommer des “ poches ” imbibées de couleurs et de sens.
Le travail n'est donc pas de néantisation, pour reprendre un terme sartrien, mais de dénuement. Une telle entreprise devient une opération bizarre, mais opération (à tous les sens du terme) nécessaire. Peintures et photographies créent des transferts non par impression mais par l'ouverture dans ce qui a existé avant lui. Surgit la liberté : elle n'est pas un laisser aller et devient un laisser (se) faire. Car l'artiste comprend qu’en sortant progressivement la photographie et la peinture de leurs conduits il ne les ne lustre plus ni ne les illustre.Il fait plus et mieux afin de donner autre chose qu’une apparence de réalité.
Contre la béatitude de l'image, il substitue de plus en plus "l'histoire à l'histoire" (Stétié), il fuit l'évènementiel dans ce qu'il possède de trop factice pour aller vers le coeur occulte et occulté du monde. D'où ses invitations ou plutôt ses traques successives qui permettent de repenser l'image à laquelle il donne déjà le signe de la pure ouverture.
Jean-Paul Gavard-Perret
Jean-Paul.Gavard-Perret@univ-savoie.fr
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Jean-Paul Gavard-Perret Né en 1947 à Chambéry, Jean-Paul Gavard-Perret est maître de conférence en communication à l´Université de Savoie. Il poursuit une réflexion littéraire ponctuée déjà d'une vingtaine d'ouvrages et collabore à plusieurs revues.
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